La grève

Dernière modification : 31 mars 2023
Temps de lecture estimé : 4 min

Le droit de grève est un principe reconnu par la Constitution mais aussi au niveau international. Il a été défini par la jurisprudence française comme un droit individuel exercé collectivement impliquant un arrêt total du travail en vue de faire aboutir des revendications professionnelles.

Le droit de grève développé ci-après concerne uniquement les salariés Ogec et non les agents publics pour lesquels les règles diffèrent.

Qu’est-ce qu’une grève ?

Il est important de distinguer la grève et les mouvements qui ne correspondent pas à la définition de la grève appelés mouvements illicites.

L’exercice du droit de grève implique en effet 3 conditions cumulatives :

  • les salariés s’arrêtent totalement de travailler ;
  • la cessation de travail doit être collective ;
  • des revendications professionnelles doivent justifier cet arrêt de travail.

Dès lors que le mouvement n’entre pas dans la définition de la grève, il ne bénéficie pas de la protection reconnue par la loi : le salarié peut donc être sanctionné.

Au préalable, il est donc important de vérifier qu’il s’agit bien d’une grève.

1. Un arrêt total de travail

L’arrêt de travail doit être total, franc peu importe sa durée : elle peut être d’une heure, d’une journée, d’une semaine etc.

Si un salarié exécute mal son travail ou au ralenti mais ne s’arrête pas totalement de travailler, il n’exerce pas son droit de grève et s’expose à des sanctions.

De la même manière, un salarié ne peut refuser d’exercer uniquement certaines tâches sous prétexte qu’il ferait la grève.

2. La cessation collective de travail

Il n’est pas exigé que l’arrêt de travail soit unanime ou approuvé par la majorité des salariés.

La cessation de travail par quelques salariés est valable, de même que la cessation de travail d’un seul salarié d’un établissement comprenant plusieurs salariés si celui-ci participe à une grève nationale à objectif professionnel.

En revanche, la cessation de travail par un seul salarié qui agit isolément, sans obéir à un mot d’ordre formulé sur le plan national n’est pas licite sauf s’il est le seul salarié dans l’établissement.

Toutes les catégories de salariés ont droit de recourir à la grève, même les cadres ou cadres-dirigeants. Par exemple, le chef d’établissement, le directeur des affaires financières ou encore le chargé de ressources humaines peuvent exercer leur droit de grève.
Il n’est pas non plus nécessaire que le salarié en question appartienne à un syndicat.

3. Des revendications professionnelles

Le mouvement doit être fondé sur des revendications professionnelles présentées à l’employeur.

Sur quels éléments peuvent porter les revendications ?

  • La rémunération : la revendication peut porter sur une demande d’augmentation par exemple.
  • Les conditions de travail : elle peut porter sur une demande de fourniture d’un moyen de transport ou bien l’octroi d’indemnités de grands déplacements etc.
  • La défense de l’emploi : la contestation d’un plan de restructuration ou d’un licenciement pour motif économique peut également fonder une grève.

L’employeur doit avoir eu connaissance des revendications des salariés au moment de l’arrêt de travail. Un courrier remis en mains propres contre décharge ou un mail peut être un moyen utile de s’assurer que l’employeur a bien eu connaissance des revendications.

Des salariés peuvent se mettre en grève par solidarité avec d’autres membres du personnel de l’établissement sous conditions. Si l’action entreprise n’est pas étrangère à des revendications professionnelles intéressant l’ensemble du personnel, le mouvement est licite.

Par exemple : une grève de protestation contre le licenciement économique d’un salarié, dans la mesure où la menace sur l’emploi que faisait peser ce licenciement intéressait l’ensemble du personnel est licite. A contrario, une grève visant à protester contre une sanction prononcée à l’encontre d’un salarié pour motif strictement personnel est illicite.

Comment la grève se déclenche-t-elle ?

Qui la déclenche ?

Elle peut être initiée aussi bien par un syndicat qu’un salarié, ou les représentants du personnel.

Faut-il respecter un préavis ?

Le salarié Ogec n’a pas à respecter de préavis contrairement aux agents publics et notamment les enseignants. Dès lors qu’un salarié informe le chef d’établissement de ses revendications (cf. ci-dessus), il peut se mettre en grève sans attendre un quelconque délai. La grève surprise, inopinée est donc licite.

L’employeur ne peut pas imposer un préavis à respecter aux salariés : une telle clause insérée dans un accord collectif, un règlement intérieur ou le contrat du salarié est nulle.

Quelles sont les effets de la grève sur la relation de travail et sur la rémunération du salarié ?

La perte de salaire

Lorsque le salarié est en grève, il ne travaille pas et n’est donc pas payé. La perte de salaire doit être strictement proportionnelle à l’arrêt de travail.

Autrement dit, si les salariés ont fait grève 30 minutes, la diminution de salaire doit être de la moitié d’une heure de travail. Cette règle est tellement importante qu’elle s’applique même aux cadres dont le temps de travail est décompté à la journée ou à la demi-journée.

L’employeur ne peut en effet retenir une demi-journée de salaire à des salariés ayant fait grève 2 heures sous prétexte que le salaire et le temps de travail se comptent par demi-journée.

Cette règle est également valable pour les salariés en répartition pluri-hebdomadaire du temps de travail.

Par exemple, un salarié doit travailler 40 heures sur une semaine donnée, au regard de son planning. Il se met en grève à compter de la 34ème heure de travail. L’employeur doit donc déduire de la rémunération mensuelle 6 heures.

Attention, la retenue sur salaire ne s’effectue que sur les heures qui auraient dû être travaillées.

  • Le salarié aurait dû travailler de 14h à 17h ; il s’est mis en grève toute la journée : une retenue correspondant à 3 heures est effectuée sur son salaire.
  • Le salarié aurait dû travailler de 13h à 18h ; il s’est mis en grève de 13h à 15h puis il est venu travailler : une retenue correspondant à 3 heures est effectuée sur son salaire.
Concernant les cadres en forfait-jours : Un cadre ayant un forfait annuel de 208 jours perçoit une rémunération annuelle de 40 000 euros brut. Il participe à un mouvement de grève de 2 heures. Comment calculer la retenue à effectuer ?

-je calcule le salaire journalier : 40 000 / 208 = 191,37 = le salaire journalier.
-je calcule ce que représente 1 heure de travail : 191,31 / 7 heures de travail = 27,33 euros par heure de travail.
-je multiplie le résultat par le nombre d’heures non réalisées : 27,33 x 2 = 54,66 euros.

La retenue sur salaire est de 54,66 euros.

Paradoxalement, l’employeur doit payer l’exécution défectueuse ou partielle du travail, le ralentissement de la production qui constituent pas juridiquement des grèves (cf. ci-dessus).

L’exceptionnel paiement des heures de grèves a déjà été admis par la Cour de cassation : A plusieurs reprises, elle a pu considérer que les salariés avaient été poussés à la grève par le comportement de l’employeur. En clair, la grève a été causée par la faute de l’employeur qui ne peut donc procéder à des retenues sur salaire. Ex : violation des règles de sécurité, non paiement des heures supplémentaires etc.

L’impossibilité de sanctionner le salarié

La participation du salarié à la grève n’est pas une faute susceptible d’être sanctionnée. La grève est un droit, et non ne peut être sanctionné pour l’exercice d’un tel droit.

Durant la grève, seuls les comportements les plus graves sont susceptibles d’être sanctionnés : les juges doivent rechercher si une faute lourde a été commise par le salarié. La faute lourde est reconnue en cas de :

  • violences ;
  • séquestration ;
  • atteinte à la liberté de travail des non-grévistes (et notamment les piquets de grève : regroupement de salariés dans l’entreprise ou à ses portes, ayant pour objectif d’inciter les salariés à se mettre en grève).

En revanche, la seule occupation des locaux ou le blocage d’un seul véhicule n’est pas considérée comme une faute lourde si les autres salariés peuvent rejoindre leur poste de travail. Les injures, les jets d’œufs etc. sont également de l’ordre de l’acceptable.

L’appréciation de la faute lourde est individuelle : l’employeur doit caractériser la participation directe et personnelle du salarié aux actes répréhensibles.

Il peut également prendre une sanction moins forte que le licenciement pour faute lourde : ce peut être un simple rappel à l’ordre, un avertissement, une mise à pied disciplinaire etc. En clair, qui peut le plus peut le moins.

En l’absence de faute lourde, la sanction est nulle.

L’employeur peut-il contrer cette grève ?

Le remplacement des salariés grévistes

Il est interdit de remplacer les grévistes par des salariés en CDD ou par des travailleurs intérimaires.

Il est également interdit de faire accomplir les tâches des salariés grévistes par des travailleurs intérimaires déjà en poste.

En revanche, l’employeur peut chercher à réaffecter le personnel non gréviste aux tâches des grévistes. Si cette réaffectation constitue une modification substantielle de leur contrat, les salariés non grévistes sont en droit de refuser (ex : accomplir des tâches totalement étrangères aux fonctions initiales, au niveau de qualification).

L’employeur peut également recourir à des prestataires extérieures pour assurer certaines activités de l’établissement.

Il est également interdit de réquisitionner les salariés grévistes à leurs postes de travail.

La fermeture de l’établissement durant la grève

Il est en principe interdit de fermer les portes de l’établissement lors d’une grève sauf lorsque le fonctionnement de l’établissement est totalement bloqué, si bien que les salariés non-grévistes ne peuvent être affectés à aucune tâche en rapport avec leurs fonctions ou bien lorsque la sécurité des salariés ou des installations ne peut plus être assurée.

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