Le licenciement économique en 10 points clés

Dernière modification : 31 août 2023
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Mis à jour le 21 août 2023

Avant d’envisager un licenciement économique, tout Ogec doit connaître globalement les conditions à remplir et les risques d’une telle procédure. Voici une synthèse en 10 points clés.

1. Qu’est-ce qu’un licenciement pour motif économique ?

C’est un licenciement prononcé pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié, résultant d’une suppression ou d’une transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques, des mutations technologiques, une réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ou à la cessation d’activité de l’entreprise (C. trav., art. L. 1233-3).

Pour que le licenciement soit économique, il faut qu’il ait un motif « non inhérent à la personne du salarié ». Le licenciement économique n’est donc pas lié aux compétences ou résultats professionnels du salarié, à son comportement ou à son état de santé, mais à la suppression ou la transformation de son emploi ou au refus de la modification de son contrat de travail.  


Qu’en est-il quand plusieurs motifs coexistent, par exemple, l’incapacité d’un salarié à s’adapter à l’informatisation de ses tâches dans le cadre d’une mutation technologique ? Dans ce cas, c’est la cause première qui détermine la nature du licenciement. Ainsi, dans notre exemple, c’est l’informatisation de ses tâches qui est à l’origine de l’insuffisance professionnelle du salarié ; si l’employeur décide de le licencier, le licenciement sera économique

2. Dans quels cas le licenciement économique est-il justifié ?

Pour que le licenciement économique soit justifié, il faut trois conditions :

– prouver la réalité de certaines circonstances économiques, notamment des difficultés économiques, des mutations technologiques, une réorganisation destinée à sauvegarder la compétitivité ou encore la cessation d’ activité ;

– établir que ces circonstances ont entrainé la suppression, la transformation de l’emploi ou la modification du contrat de travail refusée par le salarié concerné ;

– avoir tenté au préalable de reclasser le ou les salariés concernés. 

Si cette triple condition n’est pas remplie, le licenciement sera jugé injustifié, avec toutes les conséquences que cela implique, notamment le versement au salarié de dommages-intérêts et le remboursement à l’Assurance chômage des allocations chômage versées au salarié.

3. Quelles sont les obligations préalables au licenciement ?

Avant de procéder au(x) licenciement(s), il faut :

  • Mettre en oeuvre tous les efforts de d’adaptation et de formation du salarié dont le poste est supprimé pour faciliter le reclassement. L’obligation consiste donc en pratique à proposer une formation pour adapter le salarié au nouvel emploi que l’on entend lui proposer. Attention, il ne s’agit pas de fournir une formation initiale que le salarié n’aurait pas ou une formation qualifiante débouchant sur une nouvelle qualification professionnelle.
  • tenter de reclasser au préalable les salariés concernés sur un emploi de même catégorie, de catégorie équivalente (ou de catégorie inférieure avec l’accord exprès du salarié). Le reclassement doit être recherché au sein de l’établissement, de l’entreprise ou au sein du groupe, parmi les entreprises dont les activités, l’organisation ou le lieu d’exploitation rendent possible la permutation des salariés ;
  • élaborer un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE), c’est-à-dire des mesures destinées à éviter les licenciements, en limiter le nombre ou faciliter le reclassement des salariés licenciés. Cette obligation ne concerne que les établissements d’au moins 50 salariés, dotées ou non d’un CSE, qui envisagent de licencier au moins 10 salariés sur 30 jours. Le plan est défini soit par accord collectif majoritaire (« PSE négocié »), soit par décision unilatérale de l’employeur  (« document unilatéral ») ;
  • définir l’ordre des licenciements. C’est une obligation même si le projet de licenciement économique ne porte que sur un seul emploi. Concrètement, il faut appliquer des critères (charges de famille, ancienneté, caractéristiques sociales, qualités professionnelles appréciées par catégorie, etc.) pour déterminer le ou les salariés qui seront effectivement licenciés. 

4. Quelle est la procédure pour un licenciement individuel ? 

Lorsque le licenciement économique ne concerne qu’un seul salarié, la procédure à suivre est simple. Il faut :

convoquer le salarié à un entretien préalable. Le délai minimum entre la convocation et l’entretien est de cinq jours ouvrables ;

notifier le licenciement par LRAR. Le délai minimum entre l’entretien préalable et la notification est de sept jours ouvrables (15 jours si c’est un cadre) ;

informer l’Administration du travail (la DREETS, ex- Direccte). Le délai maximum est de huit jours à compter de l’envoi au salarié de la lettre de licenciement.

5. Quelle est la procédure pour les « petits » licenciements collectifs ? 

La procédure applicable pour les licenciements de deux à neuf salariés sur 30 jours comporte les étapes suivantes : 

– informer et consulter le CSE , s’il existe, sur le projet de licenciement. Le CSE a un mois pour rendre son avis ;

convoquer chaque salarié à un entretien préalable. Délai minimum entre la convocation et l’entretien : cinq jours ouvrables ;

notifier le licenciement à chaque salarié par LRAR. Délai minimum entre l’entretien et l’envoi de la lettre de licenciement : sept jours ouvrables ; 

notifier les licenciements à la DREETS. Délai maximum : huit jours à compter de l’envoi des lettres de licenciement.

6. Et pour les « grands » licenciements collectifs ? 

Pour les licenciements d’au moins 10 salariés sur 30 jours, la procédure est plus complexe, car elle dépend de l’effectif et de l’existence ou non d’un CSE. De manière très synthétique, voici les différentes étapes :

– élaborer un PSE si l’établissement emploie au moins 50 salariés ;

consulter le CSE sur le projet de licenciement (et sur le PSE si l’effectif est d’au moins 50 salariés, sauf « PSE négocié »). Deux réunions sont à prévoir. Le CSE a deux mois pour rendre son avis (délai supérieur pour les très grands licenciements) ;

– parallèlement, notifier le projet de licenciement à la Dreets qui vérifie la régularité de la procédure (et le contenu du PSE lorsque celui-ci est obligatoire). La Dreets a 21 jours pour faire des observations. Des délais spécifiques sont prévus pour l’examen du PSE. L’employeur doit répondre à ces observations ;

– puis notifier à chaque salarié son licenciement par LRAR. Le délai minimum entre la notification du projet de licenciement à l’Administration et l’envoi des lettres de licenciement est de 30 jours. Ce délai peut être allongé ou réduit en application d’un accord collectif.  

Que se passe-t-il si l’établissement n’est pas doté de CSE ? Dans ce cas, l’employeur peut engager la procédure de licenciement après la notification du projet à l’Administration, en convoquant chaque salarié à un entretien préalable. Cette convocation et l’organisation de l’entretien préalable sont soumises aux mêmes conditions qu’en cas de licenciement de moins de 10 salariés. Mais attention : la procédure n’est régulière que si l’employeur a établi un procès-verbal de carence. A défaut, chaque salarié concerné a droit à une indemnité qui ne peut être inférieure à un mois de salaire brut, en sus des indemnités de licenciement et de préavis

7. Faut-il respecter un préavis de licenciement ?

Oui, les salariés licenciés pour motif économique ont droit à un préavis d’au moins (CCN ENPL : art. 6.2 ) :

un mois pour les employés ;

deux mois pour les agents de maitrise ;

trois mois pour les cadres ;

A partir de 2 ans d’ancienneté, le préavis est trois mois pour tous.

En cas d’adhésion à un contrat de sécurisation professionnelle (CSP), le salarié n’a pas droit au préavis, ni à l’indemnité compensatrice.

8. Quelles indemnités faut-il verser au salarié ?

A partir de huit mois d’ancienneté, tout salarié licencié pour motif économique a droit à une indemnité de licenciement. Le montant minimum de l’indemnité légale est de :

– 1/4 de mois de salaire par année d’ancienneté pour les dix premières années d’ancienneté ;

– 1/3 de mois de salaire par année à partir de la onzième.

Il faut aussi verser au salarié l’indemnité compensatrice de préavis en cas de dispense de préavis, ainsi que l’indemnité compensatrice de congés payés s’il a un reliquat de congés.

9. Quelles sont les autres obligations liées au licenciement ?

Les salariés licenciés économiques ont des droits qui sont autant d’obligations pour l’employeur : 

Contrat de sécurisation professionnelle (CSP). Au cours de la procédure de licenciement (lors de l’entretien préalable pour les « petits » licenciements), il faut proposer aux salariés remplissant certaines conditions d’adhérer à un CSP. Ce dispositif leur permet de bénéficier pendant 12 mois d’un accompagnement renforcé  (bilan de compétences, VAE, formation, etc.), et d’une allocation versée par l’Unedic. En cas d’adhésion au CSP, le contrat de travail est rompu « d’un commun accord ». Le salarié a droit à l’indemnité de licenciement, mais pas à l’indemnité de préavis, qui sert à financer le dispositif. Ne pas proposer au salarié un CSP, c’est s’exposer à devoir verser une contribution (deux mois de salaire) à Pôle emploi, ainsi que des dommages-intérêts au salarié.

Priorité de réembauche. Les salariés licenciés pour motif économique ont une priorité de réembauche pendant un an à compter de la date du licenciement. En pratique, il faut informer les salariés de ce droit dans la lettre de licenciement et proposer à ceux qui ont demandé à en bénéficier tous les emplois devenus disponibles dans l’entreprise et compatibles avec leur qualification. Ne pas respecter cette obligation, c’est prendre le risque de devoir indemniser le salarié de son préjudice (indemnité minimale d’un mois de salaire si l’effectif est d’au moins 11 salariés et si le salarié a au moins deux ans d’ancienneté).

10. Quels sont les risques juridiques ? 

Le salarié peut contester son licenciement devant le conseil des prud’hommes (délai pour agir : un an). Les juges vérifient le caractère réel et sérieux du motif économique invoqué (y compris en cas d’adhésion au CSP), le respect de l’obligation de reclassement préalable, la régularité de la procédure, l’ordre des licenciements, l’application des mesures individuelles prévues dans le PSE, etc. Ils statuent en urgence. 

Si le licenciement économique est jugé sans cause réelle et sérieuse, à défaut de réintégration du salarié, l’employeur devra lui verser une indemnité fixée par le juge en fonction du préjudice subi et selon un barème dépendant de l’ancienneté du salarié (Article L 1235-3 du Code du travail). Cette indemnité est cumulable, dans les limites fixées par le barème, avec les indemnités éventuellement dues à défaut de consultation du CSE, d’information de l’Administration du travail sur le projet de licenciement ou de non-respect de la priorité de réembauche. Par ailleurs, l’employeur peut être condamné à rembourser à l’Unedic tout ou partie des allocations chômage versées au salarié, dans la limite de six mois (sauf si l’Ogec emploie moins de 11 salariés ou si le salarié a moins de deux ans d’ancienneté). 

Si le licenciement est jugé justifié, mais irrégulier en terme de procédure (entretien préalable, notification, etc.), le juge peut condamner l’employeur à indemniser le salarié (maximum : un mois de salaire).  

Le licenciement est jugé nul s’il intervient en l’absence de validation ou d’homologation du PSE, ou malgré une décision négative, ou si la décision  d’homologation est annulée.  Dans ce cas, le salarié peut exiger d’être réintégré ; à défaut, il a droit à une indemnité pour réparer son préjudice (ou égale aux salaires des six derniers mois s’il a au moins deux ans d’ancienneté et/ou si l’effectif est d’au moins onze salariés.

Pour les « grands » licenciements collectifs (au moins 10 sur 30 jours), c’est le juge administratif qui est compétent pour les contestations portant sur le PSE (décision d’homologation ou validation, notamment). Le délai pour le saisir est de deux mois et le tribunal a trois mois pour statuer.
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